Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/68

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une rapidité aveuglante et irrésistible, et tendaient toutes au même but : la fuite, la liberté, la vie. Pendant des heures entières, les narines dilatées comme celles d’un cheval, le Tzigane flairait l’air : il lui semblait qu’il sentait l’odeur du chanvre et de l’incendie. Ou bien, il tournait comme une toupie dans sa cellule, examinant les murs, les tâtant du doigt, mesurant, perçant le plafond du regard, sciant mentalement les grillages. Par son agitation, il torturait le soldat qui le surveillait par le guichet ; à plusieurs reprises, celui-ci avait menacé de faire feu.

Pendant la nuit, le Tzigane dormait profondément, sans remuer, en une immobilité invariable, tel un ressort momentanément inactif. Mais dès qu’il sautait sur ses pieds, il recommençait à combiner, à tâter, à étudier. Il avait toujours les mains sèches et chaudes. Parfois, son cœur se figeait brusquement, comme si on eût placé dans sa poitrine un bloc de glace qui ne fondait pas et qui faisait courir sur sa peau un frisson continu. À ces moments-là, le