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LE GOUVERNEUR

était glacé ; depuis quelque temps, ou ne lui servait plus du thé chaud et le haut poêle de faïence était froid aussi. Il y avait des années de cela, dès le jour où il s’était installé dans cette maison, il avait eu l’intention de faire aménager une cheminée ; mais ce projet avait été sans cesse remis, et le vieux poêle chauffait mal, quelle que fût la quantité de combustible employée.

Après s’être vainement adossé aux carreaux de faïence, il se mettait à aller et venir dans la pièce en se frottant les mains l’une contre l’autre et disait de sa belle voix autoritaire :

— Comme je suis devenu frileux !

Puis il s’asseyait de nouveau à sa table, cherchant dans les lettres quelque chose de très important, la chose principale.

« Excellence, vous êtes général, mais les généraux eux-mêmes sont mortels. Les uns meurent de mort naturelle, les autres de mort violente. Vous, Excellence, vous mourrez de mort violente. J’ai l’honneur de rester votre fidèle serviteur. »

Après avoir souri — il souriait encore à ce moment-là — le gouverneur allait soigneusement