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EN ATTENDANT LE TRAIN

partie supérieure du visage, on distinguait un nez, long et pincé, comme celui d’un cadavre. Son compagnon avait des joues larges et rouges comme une tranche de pastèque mûre, avec de petits yeux noirs pareils à des graines ; une casquette blanche posée sur sa tête ronde aux cheveux ras. Au-dessus des lèvres pleines, pointaient de petites moustaches foncées. Toute sa jeune et grasse figure reflétait une béatitude antipathique et une certaine humilité fâcheuse, Le vieillard s’assit près de moi, et s’écria d’une voix de fausset, enrouée, qu’il s’efforçait de rendre ironique et mordante :

— Songez donc, camarade Sémen Séménovitch ! Vous êtes éreinté, il faut bien réparer vos forces !

— De quelle façon, Vassili Ignatich ? Il n’y a pas de buffet !

— Cela, c’est votre affaire. Frappez et l’on vous ouvrira.

— Comment voulez-vous qu’on ouvre ? il n’y a que le mur.

Pour appuyer ces paroles, le jeune homme donna un coup de poing à la paroi peu épaisse,