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EN ATTENDANT LE TRAIN

Une femme de haute taille, enveloppée dans un manteau de toile grise, se dirigeait vers nous lentement et celui qui répondait au nom de Sacha la suivit. Quand ils passèrent près du réverbère, la lumière éclaira un beau visage féminin, et un jeune homme avec de longs cheveux. Portant une chemise bleue, il avait l’air d’un ouvrier intelligent ou d’un étudiant. La jeune fille avait des gestes tranquilles et parlait d’un ton décidé, peu soucieuse de ce qu’on pût l’entendre. Sa voix, pure et douce, avait des inflexions de tendresse dans les moindres syllabes. Les femmes qui ont cette voix tendre et ces gestes énergiques, soignent les malades particulièrement bien.

Ils s’assirent étroitement serrés, l’un contre l’autre sur le manteau de toile, étalé sur le plancher, et une main fine et blanche se posa sur l’épaule, près de la tête aux cheveux en désordre.

— Chéri, n’as-tu pas froid ?

— Naturellement non, répondit le jeune homme avec le ton négligent que les hommes croient devoir employer pour répondre aux attentions d’une femme.

Quant à moi, je commençais à sentir le froid,

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