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LE GOUVERNEUR

des et entra dans l’orangerie. Il n’y avait là qu’un vieil ouvrier, nommé Iégor.

— Le jardinier n’est pas là ?

— Non, Excellence. Il est allé en ville, chercher des greffes, c’est vendredi aujourd’hui.

— Ah ! Tout va bien ?

— Oui, Dieu merci !

À travers les vitres fraîchement lavées les rayons du soleil inondaient la serre, chassant l’humidité lourde et étouffante ; on sentait la chaleur de l’astre, sa force, sa bonté et sa douceur. Le gouverneur s’assit ; les boutons de son uniforme brillaient de mille feux ! il déboutonna son veston et regarda attentivement Iégor.

— Eh bien ! Iégor ?

Le vieillard sourit avec politesse, sans répondre à cette vague interpellation prononcée d’un ton bienveillant ; il se tenait debout, sans gaucherie et frottait l’une contre l’autre ses mains noires de terre.

— J’ai entendu dire qu’on veut me tuer, Iégor… Pour venger les ouvriers, tu sais…

Iégor continuait à sourire avec la même poli-