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Page:Andre-Chermy-La-Chair-est-faible-1926.djvu/4

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la patrie d’Isidore Tranchard, l’inventeur du moteur à soufflets.

Anatole Delaperche devait prononcer le discours inaugural du Congrès et rappeler à ce propos la vie et les déboires du malheureux Isidore, abandonné de tous, trahi par sa femme même qui avait déserté le foyer conjugal pour suivre un amant, mourant ignoré et pauvre alors que son invention merveilleuse devait faire la fortune de tant de capitalistes.

Et le chef de bureau s’était dit : « Ce soir, avant de me coucher, je potasserai mon discours. Mieux, je l’apprendrai par cœur, ainsi que font les grands orateurs. Je recommencerai demain soir et après-demain je serai en forme… très en forme ! »

C’est pourquoi, M. Anatole Delaperche se félicitait d’être descendu dans un hôtel convenable où nul ne le viendrait déranger, où aucun bruit ne le gênerait pour l’étude du panégyrique d’Isidore Tranchard,

Il avait, pour en être mieux sûr, jeté un coup d’œil, au dîner, sur les convives présents à la table d’hôtel, et avait constaté avec plaisir qu’il ne se trouvait parmi eux qu’un abbé vénérable, une demoiselle déjà mûre et quelques vieux messieurs très sérieux comme lui-même, qui sans doute, étaient des congressistes tôt arrivés.

— Tout va bien ! se disait-il… Tout va bien !

Et il se retira dans ses appartements, résolu à aborder sans tarder l’étude de sa harangue.

C’est à peine s’il prit garde à la servante qui, avant de se retirer, lui dit avec un sourire :

— Monsieur ne désire rien ?… Si Monsieur a besoin de quelque chose, le bouton électrique est à la tête de son lit. Monsieur n’aura qu’à sonner.