Aller au contenu

Page:Andre Cresson - La Philosophie francaise.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
LA PHILOSOPHIE FRANÇAISE

d’Aquin et l’Encyclopédie libre-penseuse, déiste ou athée des Voltaire, des Diderot, des d’Holbach et des Condorcet. Quelles sont donc les circonstances qui ont fissuré le premier de ces édifices et déterminé l’érection du second ? Elles s’étalent sur près de cinq siècles. Elles n’agissent du reste pas sur tous les esprits. À la fin du xviiisiècle siècle, beaucoup demeurent attachés aux doctrines religieuses traditionnelles ; beaucoup n’en abandonnent qu’une partie. Les secousses les plus rudes rencontrent des résistances obstinées, résistances religieuses, philosophiques, politiques. Impossible d’étudier ici les détails de cette histoire, du moins pouvons-nous en marquer les instants critiques, coups portés systématiquement par des penseurs conscients de leur but et de la valeur de leurs moyens, coups portés inconsciemment en dehors des intentions de leurs auteurs et parfois contre elles.

a) La première atteinte grave que la méthode scolastique ait subie est venue de Luther et de Calvin. Ce n’est pas seulement dans la Bible et l’Évangile que les scolastiques cherchent les vérités premières de leur foi. C’est l’interprétation des deux Testaments par les papes et les Conciles catholiques qu’ils considèrent comme sacrée. Comment, disent-ils, ce Dieu qui a révélé ce que relatent ces livres aurait-il abandonné leurs commentateurs quand ils le priaient de leur en préciser le sens ? Contre cette attitude, Luther et Calvin protestent. Ils ne suspectent pas la valeur révélatrice des livres saints. Mais nul, à leur avis, ne doit être astreint à en chercher la signification dans les commentaires catholiques. Chaque individu doit lire lui-même les textes sacrés et les comprendre à sa manière. L’autorité de la Bible et de l’Évangile n’est pas en question. Celle que s’arroge l’Église