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Page:Andre Cresson - La Philosophie francaise.djvu/21

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DE LA SCOLASTIQUE À LA RÉVOLUTION
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catholique est abusive ; nous pouvons et devons nous en libérer.

Descartes est plus hardi dans ses termes. Mais il a des réticences. Il le déclare à mainte reprise, mais peut-être par simple prudence : les vérités de la foi catholique sont et restent « les premières en sa créance ». Seulement, en même temps qu’il fait cette déclaration, il pose des principes méthodiques qui, pris à la lettre, l’annulent radicalement. Il invite, en effet, le chercheur à « ne rien admettre comme vrai que ce qui lui paraîtra évidemment être tel ». Il le met en garde contre « la précipitation du jugement » et « la prévention ». Il lui rappelle que, dans les matières un peu difficiles, il ne faut se fier ni à l’opinion de « la pluralité des voix », ni à celle de tel ou tel penseur dont le nom fait autorité. N’est-ce pas proclamer que si la pensée veut découvrir le vrai, il faut qu’elle se rende entièrement libre ? Seul « le doute méthodique » peut nous conduire sûrement à la vérité. Il nous faut examiner les sources de nos convictions, éliminer toutes celles qui prêtent au moindre soupçon. Pour n’avoir plus que des pommes saines dans un panier, le mieux n’est-il pas de le renverser, d’examiner les fruits un à un et de ne reprendre que ceux qui sont sans défaut ? Faisons de même pour n’avoir plus que des opinions sûres.

Un tel principe est-il autre chose que celui de la libre pensée ? Sauf en matière de foi religieuse, voilà donc, pour Descartes, l’esprit critique au pinacle. Il reste toutefois, dans la méthode qu’il préconise, une grave imperfection.

Descartes est un grand mathématicien. Or les mathématiques se construisent entièrement a priori. Elles posent par intuition leurs définitions, leurs axiomes et leurs postulats. Après quoi elles l’éta-