Page:Andreae - Les Noces chymiques, 1928, trad. Auriger.djvu/165

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
139
SEPTIÈME JOUR

d’Isis c’est connaître la partie secrète de la Nature Mère, et la connaître, c’est presqu’égaler Dieu, car c’est presque toute la Connaissance. Et eritis sicut Dii. (Gen. Chap. 3. Vers 5). C’est goûter au fruit de l’arbre de Science, acte qui porte en soi son châtiment. Chr. Rosencreutz est confondu par la réponse du Roi lui disant que le gardien ne peut être délivré que par quelqu’un ayant commis la même faute, et qui prendra sa place. Les calculs astrologiques de ce gardien étaient rigoureusement exacts, puisque par le seul examen de la position des Astres, il avait conclu que pour lui, les temps étaient révolus, et qu’un autre homme avait à son tour découvert Vénus. Ce gardien du premier seuil est le conservateur de la tradition occulte, qui veille jalousement et sans cesse sur les trésors que nous ont laissés les anciens collèges de Mages. Il serait, téméraire d’en rire car de récents exemples ont pu prouver aux initiés de quelle façon étaient châtiés les bavards qui dévoilaient inconsidérément Isis aux profanes.

Il me revient en mémoire, dans un autre ordre d’idées, certains passages du deuxième chapitre de L’Apocalypse hermétique, où le héros de l’œuvre prend rituellement la place d’un gardien ; l’ordre des événements n’est pas le même, mais cependant le gardien libéré découvre aussi une jeune et belle femme nue étendue sur un sopha ; il en est châtié et se retrouve seul dans une salle où un agneau est couché sur un gros livre. Comme il cherche à ouvrir ce livre, un homme noir le frappe au front comme le fit une pierre aigüe pour Christian Rosencreutz au cours de son premier songe.

Les cinq commandements des Chevaliers de la Pierre d’Or résument las points essentiels de la doctrine des Frères de la Rose-Croix. Du fait que le grade de Chevalier est conféré aux Artistes, ils acquièrent du même coup le pouvoir d’agir à leur gré sur l’ignorance, la pauvreté, la maladie, et c’est en effet là le vrai but du Grand Œuvre. N’est-il pas surprenant de voir un homme arrivé aux suprêmes degrés auxquels peut aspirer la connaissance humaine écrire au-dessus de sa signature : Summa Scientia nihil scire. La science suprême est donc la négation de la science ! Comment ne pas se souvenir ici de La Philosophie occulte de Henri Corneille-Agrippa que l’auteur répudia dans la suite par le De Vanitate Scientiarum ?

La fin de ce Septième Jour est confuse et n’a plus d’intérêt direct. Toujours fidèle à ses sentiments d’humilité, notre héros confesse sa faute en dépit de son astucieux calcul tendant à faire délivrer le gardien et lui-même, on lui passe au doigt la bague que portait le gardien de la première porte, pour lui conférer ses fonctions et cependant il rentre le lendemain sain et sauf chez lui après avoir passé ta nuit avec le vieil Atlas et le vieux Seigneur de la Tour Ainsi