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VII


 
Je cache à mon ami que mon cœur est en deuil,
Que notre long amour qui faisait sa surprise,
Et dont il croit encor qu’il reste mon orgueil.
S’est brusquement rompu comme un jonc sous la bise ;

Quand je le vois venir, j’évite son accueil ;
Quand il parle de toi, ma réponse indécise
Fait penser que mes pas vont toujours vers ton seuil ;
Devant l’aveu cruel mon âme temporise,

Je recule le jour où je devrai répondre,
Et je parle de nous avec un air heureux
Qu’un sanglot mal vaincu menace de confondre ;

J’ai peur, quand je dirai nos éternels adieux
Et la ruine intime où tout mon cœur s’effondre,
J’ai peur de la pitié qui luira dans ses yeux !