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XLI


3

Le moucheron lui dit : « De quoi te vantes-tu ?
Ton amour saurait-il durer plus que toi-même ?
Et tu sais que ta vie, en sa limite extrême
S’étend de l’aube au soir, et du grain au fétu.

Que deviennent les nids quand l’arbre est abattu ?
Quand le luth est brisé, que devient le poème ?
Que devient le reflet quand meurt le chrysanthème ?
Que devient la chanson quand le chanteur s’est tu ?

Ton amour comme toi n’est qu’une chose brève ;
Quand le rêveur expire, expire aussi le rêve,
Près du guerrier tombé tombe le javelot.

Que viens-tu nous parler d’amour impérissable
Quand ta vie est croulante ainsi qu’un tas de sable
Qu’efface un coup de vent et que recouvre un flot ? »