Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t1, 1905.djvu/118

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La beauté que tu vois en moi leur est pareille,
Le même mouvement la forme et la détruit,
Le rythme dont ton œil abusé s’émerveille
N’est qu’un rapide accord qu’aucun autre ne suit.


Tu rêves d’un amour que nul âge n’efface,
Celle à qui tu suspens ce rêve va périr ;
Comment veux-tu graver sur une onde qui passe
Un souhait que le bronze aurait peine à tenir ?


Ne considère en moi qu’une courbe légère,
Sur le point de se rompre et de se disperser,
Qu’un peu de la commune et mauvaise poussière,
Dans les mobiles jeux de l’Être, vient tracer.


Elle a déjà servi pour d’autres apparences,
Et, mêlée au néant d’autres dispersions,
Dans l’enchevêtrement de neuves existences,
Formera des laideurs ou des séductions.


Garde donc ton esprit et ton cœur de se prendre
Au simulacre vain qui passe devant toi,
Qui s’efface en passant, et ne peut pas s’étendre
Au delà d’un instant de plaisir et d’émoi.