Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t1, 1905.djvu/126

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Mais j’ai su démêler la malice et la fourbe
De l’oiseleur qui tend ses éternels appâts,
Et j’ai mené mon corps hors de l’aveugle tourbe
Qui se sème elle-même aux sillons du Trépas.


Ce n’est pas dans des monts neigeux que je suis née.
Mais c’est sur un sommet serein et glacial
Que je mourrai, sachant porter ma destinée
Loin des tièdes limons vers le froid sidéral.


Mes mains, vides d’amour, seront du moins intactes
Des larmes et du sang qui sortent de l’amour ;
Notre infécondité est le seul de nos actes
Dont le bienfait survive à nos êtres d’un jour.


Apprends donc que l’effort que ton vouloir, peut-être,
Applique au clapotis de l’acte et du savoir,
Moi, je l’ai fait descendre aux abîmes de l’être,
Jusqu’à l’instinct qui git plus bas que le vouloir ;


La lueur de raison qui flotte sur ta vie,
Je l’ai portée aux fonds où la vie a son lit,
Sous les profondes eaux où la bête assouvie
Crée un siècle de mal hors d’un moment d’oubli ;