Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t1, 1905.djvu/31

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Était sur ce visage émouvant comme un chant ;
Et son rêve emplissait la beauté du couchant.


Car les portes des vents irrités s’étaient closes,
Et la mer n’ondulait qu’à peine en lents plis roses
Sur lesquels des oiseaux neigeux s’étaient posés ;
Le soleil s’approchait des flots tranquillisés,
Dans l’azur où naissaient des teintes de glycine,
Et la terre accueillait la vaste paix marine.
L’étrangère restait immobile ; longtemps
Je pus saisir encor ses beaux regards, flottants
Par delà les splendeurs dont l’occident ruisselle,
Et son sourire doux qui semblait loin en elle.
Quand le soleil ne fut, sous l’espace moins bleu,
Qu’un demi-disque d’or, coupé d’un trait de feu,
Et qu’au pied des chardons cessa leur ombre aigue,
Elle fut radieuse, un instant suspendue
Dans la gloire, au-dessus du tertre éteint et froid.
Rappelant ses regards de leur distant émoi,
Et le front incliné, d’une démarche lente,
Elle s’en retourna par le jardin en pente,
Dans ce dernier rayon qui ne la quittait pas,
Mais mourait sur le sol quand s’éloignaient ses pas.
Si bien qu’elle emportait la lumière avec elle.