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D'autres fois, il profite d'une après-midi de pluie qui empêche de rentrer les grains. On est au moment de la moisson :

J'y suis occupé aussi et nous y allons bon train,

Mais des averses aigres, cinglantes, l'ont mouillée ;

Alors, j'ai pris ma vieille plume écachée

Avec beaucoup de peine,

Et j'ai pris mon couteau et je l'ai taillée

Tout comme un clerc i.

Mais pendant qu'il écrit, le vent a monté , et voici qu'il est en train de culbuter les gerbes ; il faut courir, aller donner un coup de main pour les redresser, car la nuit tombe. L'épître se tirera d'affaire comme elle pourra:

Mais voici nos gerbes renversées par la rafale,

Et voici que le soleil clignote à l'Ouest,

il faut que je coure rejoindre les autres,

Et que je quitte ma chanson ;

Ainsi je sous-signe en hâte

Votre: Rob le vagabond *.

Il arrive qu'il prend un instant sur le lieu même du travail et qu'il profite d'une averse qui oblige les moissonneurs à se réfugier derrière les gerbes ; il improvise une épître achevée de forme et toute nourrie de pensée :

Tandis que les faucheurs se blottissent derrière les gerbes,

Pour éviter l'àpre, la piquante averse.

Ou courant à la débandade s'enfuient ;

Pour passer le temps

Je vous consacre une heure

En rime oisive 2.

Plus souvent encore il composait en labourant. « Tenir la charrue, dit Gilbert, était chez Robert une attitude favorite pour ses compositions poé- tiques et quelques-uns de ses meilleurs vers furent produits pendant qu'il était à ce travail^. » Rien n'est plus caractéristique que l'origine de sa \ ëceàune Souris. Il labourait un champ voisin de la ferme ; c'était aux labours de novembre. Le soc, en versant la glèbe, disperse un petit tas de feuilles mortes et de paille, un nid de "souris. En voyant la bestiole chassée de son refuge, ruinée, s'enfuir sous la bise, sur ce terrain dénudé, une commisération prit Burns. Puis, avec ce vaste horizon attristé autour de lui, il songea à sa propre vie, à peine plus assurée, exposée aussi aux

1 Third Epistle to Lapraik.

2 Epistle to the Rev. John Mac Math.

•* Gilbert, Letter to D^ Currie, rcspecting the composition of his Brother's Poems. I. 8