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noble et lui une vieille créature décrépite du plus bas degré ^ » C'est de cette fenêtre qu'il haranguait souvent la populace. C'est ici qu'il s'étei- gnit, épuisé par un demi-siècle de fatigues, de dangers et de colères, le 12 novembre 1572. C'était un homme violent et d'un sombre fanatisme, mais courageux. « Il n'a jamais ni craint ni flatté aucune chair », dit à ses funérailles le régent Morton, qui ne l'aimait pas ^.

Et voilà l'hôtel de Moray. De ce lourd balcon de pierre , Archibald duc d'Argyle, vint avec toute sa famille insulter le noble Montrose vaincu, garrotté, sali par la boue de la populace et traîné sur un tombereau que conduisait le bourreau portant sa livrée 3. C'est de là que lady Argyle cracha sur le prisonnier ; c'est là qu'ils tremblèrent tous, subitement décontenancés et honteux, sous le calme regard dont il les regarda *. Deux jours après, le « grand marquis » fut pendu à un gibet haut de trente pieds. Ses amis lui avaient porté de quoi mourir princièrement: il était vêtu d'écarlate orné de broderies d'argent. Il marchait avec un si grand air, tant de gravité et de beauté, que ses ennemis même versaient des larmes ^. Sa tête fut fichée sur la prison d'Edimbourg ; mais il avait dit qu'il s'en honorait plus que si on avait arrêté que sa statue en or serait dressée sur la place du marché ou son portrait suspendu dans la chambre du roi ; ses membres découpés furent envoyés à quatre villes d'Ecosse pour y être exposés : une main sur la porte de Perth, l'autre sur celle de Stirling ; une jambe et un pied sur la porte d'Aberdeen, l'autre sur la porte de Glasgow ; le tronc fut enterré par les aides du bourreau sous le gibet * ; mais il avait dit qu'il souhaitait avoir assez de chair pour qu'on en envoyât dans les cités d'Europe, en mémoire de la cause pour laquelle il mourait'. Douze ans après, c'était au tour d'Argyle lui-même; il fut déca- pité dans la High Street. Il mourut avec fermeté et une dignité calme. Sa tête remplaça sur la pointe de la prison celle de Montrose , dont les restes furent rassemblés et ensevelis avec pompe dans St-Giles^. A chaque instant on rencontre de ces grandes morts dans les annales d'Edimbourg ; elles dégouttent de sang.

Ainsi, de toutes parts, de ces cent ruelles et allées pendues aux flancs de la Grande-Rue, avec les noms historiques des Dundas, des Beaton, des

^ Mac Crie. Life of Knox, Period vm, p. 217, la note hhh , à la fin du volume, p. 394, et la note ix, p. 472. — James Grant. OW and New Edinùurgh, tom I, ch. xxiv.

2 Hill Burton, tom V, chap. Liv, p. 87.

3 Walter Scott. Taies of a Grand Falher, chap. xLvi.

4 Voir les extraits des Wigton papers , dans Aytoun Lays of Ihe Scoltish Cavaliers. ^ Voir l'extrait de Nichol's Diary, donné par Aytoun dans ses Lays of Ihe Scollish

Cavaliers ; et la note de Wishart, donnée par Walter Scott, à l'endroit déjà cité.

6 Hill Burlon, tom VII, p. 8.

'^ Walter Scott. Taies of a Grand Father, chap. xlvi, d'après les Wiglon Papers.

8 Wilson. Réminiscences of OUI Edinburgh, tom II, p. 112 ; — et Aytoun, l'introduc- tion eu prose au poème sur Montrose.