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et les mieux faits pour lui faire ouvrir toutes les portes, l'un de la noblesse, l'autre de la société littéraire d'Edimbourg. Le premier était le comte de Glencairn, auquel Burns voua un véritable culte qui ne se démentit jamais. C'était un homme dont la beauté physique était l'expression d'un caractère sans reproche. « Le noble comte de Glencairn m'a pris par la main aujourd'hui et s'est intéressé en ma faveur, avec une bouté digne de l'être bienfaisant dont il porte si noblement l'image. Il est une plus forte preuve de l'immortalité de l'àme que toutes celles que la philosophie a jamais proposées ; une àme comme la sienne ne peut mourir ' ». Ailleurs il l'appelle « un homme dont je me rappellerai les vertus et la bonté frater- nelle envers moi, au delà de tous les temps ^ ». L'autre protecteur était le fameux avocat Henry Erskine, le doyen de la faculté des avocats, d'une éloquence incomparable, d'un charme social, d'une sûreté de commerce, qui le faisaient aimer et respecter partout. Ces deux connaissances furent vite faites et leur effet fut très rapide, car le 7 Décembre, dix jours seule- ment après son arrivée à Edimbourg, le poète pouvait écrire :

En ce qui concerne mes propres affaires, je suis en bon chemin de devenir aussi éminent que Tiiomas à Kempis ou Joiin Bunyan, et vous pouvez dorénavant vous attendre à voir mon jour de naissance inséré, parmi les événements merveilleux, dans l'Almanach du Pauvre Robin ou l'Almanach d'Aberdeen, à côté du Lundi noir et de la bataille de liotliwell- Bridge. My Lord Glencairn et le Doyen de la Faculté M' H. Erskine m'ont pris sous leur aile et, selon toute probabilité, je serai bientôt le dixième homme de bien et le huitième sage du monde 3.

A ces deux protections, il faut ajouter celle de Dugald Stewart, qui le présenta à Mackenzie, à l'auteur de ï Homme de Sentiment, à celui que Burns révérait et admirait depuis si longtemps , qui avait été un des maîtres et un des consolateurs de sa jeunesse. Ce fut un coup de bonheur pour le poète. Mackenzie continua l'heureuse influence qu'il avait eue sur sa vie. Dans le n" 97 du Lounger, qui ne devait plus avoir que quatre numéros, parut un article qui fut un événement. Il était digne de celui qui en était l'auteur et de celui qui en était l'objet. Il y avait, de la part de cet écrivain si laborieux et si correct, une très claire et très large intelligence littéraire et psychologique du génie et du caractère de Burns. Cette double appréciation était exprimée en termes parfaits de justesse et d'accent, à ce point que, non seulement cet article donnait du premier coup la note exacte et entière sur la valeur du poète, mais que, après cent ans, il reste une des meilleures choses qu'on ait écrites sur lui ; c'est une longévité rare pour une page de critique. Voici d'ailleurs, dans ses parties essentielles, l'article que les habitants d'Edimbourg se passaient

1 To James Dalrymple, 20^^ Nov. 1786.

2 To John Ballantine, 13lli Dec. 1786.

3 To Gavin Hamillon, Dec. 7th nsô.