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Sharpe, un vieux g:entilhomme très sec, très poli et très caustique, qui se promenait, au commencement de ce siècle, avec le costume du siècle dernier et savait, sur ses contemporains et leurs ancêtres, une foule de méchantes histoires, avait à ce sujet une chanson qu'il disait de sa voix aiguë * :

Il y avait quatre dames grises

Qui sont restées ensemble,

Depuis midi, un matin de mai,

Jusqu'à dix heures sonnées du soir ;

Jusqu'à dix heures sonnées du soir ;

Alors, elles y renoncèrent.

Et il y eut quatre dames grises

Qui descendirent le Nether Bow^.

Cela fait au moins sept dames écossaises qui se grisèrent pendant le xviii^ siècle. Sans doute il n'y en eut pas d'autres. Toutefois , c'était une coutume parmi celles de la plus haute société que de faire des parties dans les caves à huîtres, les oyster cellars.En hiver, après la tombée de la brune, on prenait rendez -vous avec quelques gentlemen, et on allait, en carrosse, passer sa soirée dans un de ces trous sordides qu'on appelait des basses boutiques^. On s'y régalait de jiorter, une bière très brune, et d'huîtres, placées dans de grands plats en bois sur des tables grossières éclairées par une chandelle. Il était convenu que la conversation y était plus libre, plus hardie et presque sans frein. Elle se délassait de la bienséance des salons. Quand on avait déblayé les tables, on apportait du cognac ou du punch au rhum, selon le goût des dames. On dansait ensuite. Dans ces parties élégantes il arrivait que les ladies faisaient danser avec elles les huîlrières, bien quelles eussent la pire réputation. Tout cela allait, dit Chambers, sous le nom commode d'escapade *. Plus de dix années après le séjour de Burns, lord Melville , qui était alors ministre de la guerre, et la duchesse de Gordon, notre connaissance, la protectrice du poète, se retrouvant à Edimbourg, firent une partie de cave à huîtres et consacrèrent une soirée à ce plaisir de leur jeunesse ^. C'était la façon d'alors d'aller au cabaret.

Aussi quand la nuit tombait , une vie souterraine s'éveillait de toutes parts dans les entrailles de la vieille cité. On voyait les hommes les plus distingués s'enfoncer par groupes dans ces étroites ruelles, s'engloutir dans ces trous noirs, au fond desquels étaient les tavernes mal éclairées ^.

1 Voir sur ce singulier personnage : Wilson, Réminiscences of Old Edinburgli, tom I, p. 14-15.

2 Wilson. Réminiscences of Old Edinburgh, tom I, p. 222.

3 R. Chambers. Traditions, p. 160.

  • R. Chambers. Traditions, p. 161, en note.

S R. Chambers. Id., p. 161.

  • Voir sur ce point le poème de Fergusson, Auld Reekie.