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Page:Angellier - Robert Burns, I, 1893.djvu/341

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ni les paroles d'une âme commune. Elle était bonne : « Ma main n'a pas obtenu la joie de donner, mais le ciel accepte mon désir de donner » ; elle était mère excellente ; elle avait un fonds solide de religion et d'honnêteté qui fut longtemps son soutien dans la crise qu'elle allait traverser. Elle était, quand il le fallait, décidée et vaillante.

Tout cela formait , en somme , une nature assez riche et assez bien équilibrée, une physionomie aimable de petite bourgeoise intelligente, animée , capable de passion plutôt que passionnée , sans très haute distinction, avec plus de vivacité que de profondeur et plus d'attrait que de charme. Il lui manquait la séduction suprême, je ne sais quelle suavité victorieuse par dessus tout. Elle le savait et elle l'avouait avec la franchise et la justesse qui étaient de ses qualités et avaient leur bonne grâce. En parlant d'une petite pièce de vers qu'elle avait faite, elle disait : « Elle n'a pas de mérite poétique, mais elle donne des indices d'une délicate âme féminine, une âme comme je voudrais que la mienne fût ; mais ma vivacité me prive de cette douceur qui est , dans mon opinion, le premier ornement d'une femme* ». Cet arôme subtil, la fleur parfumée qui rend certaines vies suaves ou troublantes , lui faisait défaut. La sienne appartenait à la famille d^s plantes brillantes et sans parfum. C'était une nature facile, bien douée, avec un certain éclat, mais sans cette marque de personnalité qui , placée ici ou là , met un être à part. Elle avait cependant quelque chose d'attachant, car elle conserva un cercle d'amis très fidèles qui ne la quittèrent, les uns après les autres, que lorsque la mort les appela.

Ce qu'on sait de son apparence physique concorde bien avec cette physionomie morale. C'était une femme de petite taille, bien prise, avec plus de vivacité, de mouvement que de véritable grâce, comme il arrive aux personnes un peu courtes et destinées à prendre de l'embonpoint. Quelqu'un qui la vit, dix ans après cette époque, lui appliquait les mots de Byron « fair, fat and forty ^ ». Ses extrémités étaient petites, ce qui va presque toujours avec une démarche alerte. Il reste d'elle une de ces silhouettes noires découpées qui étaient alors à la mode ; le profil sans être très distingué est agréable, le front droit et bien assis , le nez retroussé, la bouche assez forte et ferme ; une physionomie pas très raffinée mais plaisante et drue. C'est probablement ce qui a fait dire à Chambers qui manquait de nuances : « Elle était d'un genre de beauté un peu voluptueux. »

En réalité et en regardant de plus près, on sent , au-dessous d'une sentimentalité un peu factice entretenue par des lectures , on sent une femme fort raisonnable , fort pratique, à qui il n'a manqué qu'un foyer

1 To Sylvandcr, 19th Jan.

2 SçoU Douglas, tom. V, p. 111.