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tement qui, en quelque manière, me sont particulières à moi seul — ou peut-être, ici et là, à quelque autre original comme moi. Tel est le plaisir particulier que je prends à la saison de l'hiver plus qu'à tout le reste de l'année. Ceci, je le crois, peut être dû en partie à mes malheurs, qui ont donné à mon esprit une tournure mélancolique ; mais il y a quelque chose dans

La puissante tempête et le désert blanchâtre. Abrupt et profond, étendu au-dessus de la terre ensevelie,

qui élève l'esprit à une sublimité sérieuse, favorable à tout ce qui est grand et noble. Il y a à peine aucun spectacle terrestre qui me donne — je ne sais si je dois appeler cela du plaisir, mais quelque chose qui m'exalte, quelque chose qui me soulève — plus que de me promener sur l'orée abritée d'un bois ou d'une haute plantation, par un jour d'hiver nuageux, et d'entendre un vent d'orage hurler dans les arbres et gronder sur la plaine. C'est ma meilleure saison de dévotion ; mon esprit est enlevé dans une sorte d'enthousiasme vers celui qui dans le langage pompeux de l'Écriture (( marche sur les ailes du vent *. »

C'est à cette même influence qu'il faut rattacher quelques pièces qui n'ont pas grande valeur dans son œuvre, mais qui ont une certaine importance dans sa biographie, car elles témoignent d'une tendance vers une école littéraire qui pouvait être dangereuse pour lui. La chanson suivante fut composée dans un des moments qu'il a dépeints plus haut.

L'Ouest hibernal souffle sa rafale.

Et jette la grêle et la pluie ;

Ou bien le Nord orageux envoie et chasse

Le grésil et la neige aveuglants ;

En chutes brunes, le ruisseau descend

Et rugit entre ses rives

Oiseaux et bêtes restent à couvert

Et passent le jour maussade.

La rafale balayante, le ciel assombri ,

Le jour d'hiver attristé ,

Que d'autres les redoutent; pour moi ils sont plus chers

Que toute la pompe de Mai.

Le hurlement de la tempête apaise mon âme,

Il semble s'unir à mes douleurs;

Les arbres sans feuilles plaisent à ma pensée ,

Leur destin ressemble au mien 2.

Ces derniers vers sont de l'Ossian tout pur. C'en est la note mélan- colique et orageuse. « Les hommes se succèdent comme les flots de l'océan ou comme les feuilles des bois de Morven. Desséchées elles volent au souffle des vents ^. » C'est presque le cri de René , le cri si étrange,

1 Common place Book, April, 1783.

2 Winter, a Dirge.

3 Ossian.