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entaché de libéralisme, la congrégation quitta l'église : « Votre sot fils Francis, dit un des anciens à son père, a troublé la congrégation par son sot bavardage, car il a bavardé pendant une heure d'un Dieu bon et bienveillant, et il a dit que les âmes des païens eux-mêmes vont au ciel, s'ils suivent les lumières de leur conscience. Le stupide garçon ne s'inquiète pas s'il ne dit pas un mot des bonnes et confortables doctrines de l'élection, de la réprobation, du péché originel et de la foi. Fi ! homme, nous ne voulons pas d'un tel individu *. »

De même , ils chérissaient la verge de fer par laquelle ils étaient menés et ils criaient au relâchement quand il paraissait un peu de tolérance. « L'affaiblissement de la discipline, dit Hill Burton, fut une des principales causes qui créèrent les scissions , pendant le dix- huitième siècle ^. » On a remarqué que les séparations dans l'église écossaise se sont toujours produites dans le sens de la sévérité. Lorsque l'église avance un peu , fait quelques progrès , s'éloigne insensiblement de l'ancienne rigidité , il y a des groupes qui se détachent, qui restent en route, ne voulant pas la suivre, abandonner la rigueur première. Tandis qu'ailleurs les dissidences se produisent généralement en avant, elles se font ici en arrière ; ailleurs les non- conformistes prétendent avoir fait un progrès ; ils pensent, ici, s'être gardés d'une décadence ^. Les scissions se font, pour ainsi parler, en cercles concentriques. Chacune des communions prétend être le vase dans lequel se conserve dans son intégrité, le parfum de la véritable église d'Ecosse, et s'enorgueillit de son orthodoxie. Ce goût pour le dur contrôle du clergé était si ancré dans le peuple que, aujourd'hui même, dans les fractions presbytériennes qui se sont détachées de l'église pour suivre un régime plus strict, les ministres ont la main forcée par leurs congrégations et sont contraints d'observer des pratiques d'un rigorisme qu'ils relâcheraient volontiers ^ .

Ainsi, l'austérité puritaine avait pénétré le pays ; il n'y avait nulle part de refuge contre la domination ecclésiastique, et si on se rebellait contre elle, on se mettait du même coup en révolte contre la société. Il n'est pas étonnant qu'après avoir étudié de près cet état social Buckle ait comparé l'Ecosse à l'Espagne pour la bigoterie , et que Lecky ait dit que , pendant le dix-septième siècle, il y eut plus de réelle liberté religieuse à Naples et dans la Castille que dans l'ouest des Basses-Terres de l'Ecosse ^.

1 Lecky. History of England in ihe XYIIl^h ccntury, tome II, p. 539.

2 HiU Burton, tome VIII, chap. xci, p. 390.

3 Dean Stanley, Church Scotland, p. 64.

4 Hill Burton, tome VIII, chap. xci, p. 390.

■'» Buckle, tome III, p. 4. — Lecky, tome II, p. 85.