Page:Angellier - Robert Burns, I, 1893.djvu/97

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— SS- II faut reconnaître qu'il y avait dans cette domination inflexible une grandeur et une noblesse singulières. Cette discipline faisait, des âmes qui pouvaient la supporter, des âmes d'une austérité, d'une gravité, d'une pureté parfaites et continuelles. Elles vivaient dans une sorte de raideur impeccable, il est vrai, mais dans un sentiment constant du devoir, sans défaillances, sans hésitations, droites et fermes jusqu'à la mort. La constitution démocratique du clergé, le contact incessant de la Bible, avaient fait entrer, jusque dans les plus basses classes de la nation, le sens libérateur de la petitesse des choses humaines et le sens élevant de la présence des choses divines. Les plus humbles, les derniers , les plus ignorants , étaient munis d'une direction sûre et minutieuse de la vie. Ils travaillaient, souffraient, allaient de l'enfance à la caducité, sous un regard toujours fixé sur eux. Ils portaient cette crainte religieuse qui est le commencement de la sagesse. Ils trouvaient, dans la lecture assidue de la Bible, un soutien et toute une culture. C'est ainsi qu'on arrivait à des vies de paysans comme celle du père de Burns. Aucun pays n'en pouvait offrir de comparables. Tous les soirs, sous des milliers de toits qui étaient plus pauvres, plus misérables, plus ouverts aux vents et aux froids que dans la majeure partie de l'Europe, se passait une scène que nulle part on n'aurait retrouvée, lorsque le paysan, après le repas, prenait la Bible de la famille, oîi étaient inscrites les naissances et les morts, en lisait et souvent en commentait un chapitre. Ces pauvres intérieurs en étaient comme sanctifiés pendant un moment. Il y avait vraiment sur tout le pays une heure solennelle. L'Ecosse n'a rien eu dont elle puisse être plus fière. Burns a laissé un admirable tableau de ce côté de la vie écossaise dans une pièce qui est l'expression la plus haute de l'influence de la religion presbytérienne.

Vers la fin du premier quart du xviii' siècle , un commencement de réaction s'était manifesté et quelques germes de libre examen et d'émancipation avaient été jetés. Le mouvement partit de l'Université de Glasgow où un grand nombre de ministres presbytériens d'Ecosse et la plupart de ceux d'Irlande étaient formés ^ Il avait faiblement com- mencé avec John Simson, qui avait occupé la chaire de théologie de 1708 à 17î29. Son enseignement semble avoir été fait de subtilités métaphysiques dans lesquelles se glissaient des erreurs de doctrine sur des points essentiels. Il fut, de la part des cours ecclésiastiques, l'objet d'une plainte devant l'Assemblée Générale. D'interminables discussions s'engagèrent qui durèrent pendant quinze années^. L'Assemblée Générale

1 Autobiography of Dr Alexander Carlyle of Inveresk, chap, m, p. 82. — Lecky, tome II, p. 538.

2 Hill Burton, tome VIII, p. 399. — Voir dans les St-Giks' Lectures (1= série) la lecture ix, The Church in the Eighlemth Cenlury, par Rev. John TuUoch.