Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— 184 —

De chaque côté, les ruisseaux trottinent,

Et se rencontrent au-dessous de ma chaumière ;

Le bouleau odorant el l'aubépine blanche

Unissent leurs bras par-dessus le bassin,

Pour abriter le nid des petits oiseaux,

Et le refuge plus frais des petits poissons ;

Le soleil jette un bon regard dans la chambre

Où, joyeuse, je tourne mon rouet.

Sur les hauts chênes, les ramiers gémissent,

L'écho apprend par cœur leur triste histoire ;

Les linots, dans les noisetiers des berges.

Heureux, rivalisent dans leurs chants.

Le raie de genêt dans la luzerne,

La perdrix bruyante dans la jachère,

L'hirondelle voletant autour de mon abri,

M'amusent, assise à mon rouel.

Avec peu à vendre et moins à acheter,

Au-dessus du besoin, au-dessous de l'envie,

Oh ! qui voudrait quitter cet humble étal

Pour tout l'orgueil de tous les grands ?

Parmi leurs brillants et vains jouets,

Parmi leurs joies bruyantes et gênantes ,

Peuvent-ils rCvSsentir la paix el le plaisir

De Bessy à son rouet ? i

Cette petite fileuse, joyeuse de son sort, qui chante en tournant son rouet, tandis que les oiseaux s'aiment, les ruisseaux s'unissent, les branches se marient, au dehors, et que le soleil regarde avec bonté dans la chambre, n'est-elle pas charmante ? La moelleuse caresse de la lumière enveloppe toutes ces caresses. N'est-ce pas, surtout avec cette riche demi-teinte de pourpre, un intérieur d'un Peter de Hooch villageois?

Lorsque la réalité, généralement assez laide, le laissait échapper, Burns se trouvait plus à l'aise pour laisser jouer sa faculté d'embellir les choses et de les rendre plus légères. Quelques-unes de ses plus délicates peintures ont pour sujet des êtres fantastiques, des fées, des elfes, des esprits. Nous ne reviendrons pas sur l'apparition de la Muse, dans la Vision. Tout le commencement est plein de grâce ; et la fin est d'une vraie beauté simple. Voici une jolie et lumineuse cavalcade de fées et de lutins, qui bondissent follement dans des rayons de lune, et qui font penser au cortège de Titania. C'eût été un sujet de tableau pour Sir Noël Paton '-.

1 Bess and hcr spinning wheel.

2 Les deux curieux tableaux de Sir Noël Paton, à la National Gallery d'Edimbourg, représentant Le Songe d'une iiuil d'été', d'une invention si ingénieuse et si touffue.