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de « ces grandes fiançailles nouvellement célébrées, dans leur capitale, à la face du ciel » et son cœur s'écria :

Honneur au zèle du patriote !

Gloire et Espoir à la Liberté qui vient de naître !

Salut aux puissants projets du siècle !

Glaive infaillible que la Justice manie,

Va et prospère, et vous, feux vengeurs,

Élevez-vous jusqu'aux plus fiantes tours de l'Orgueil,

Animés par le souffle de la Providence irritée I *

Quand il revint, il entendit le fifre de la guerre qui remuait joyeuse- ment toutes les âmes, « comme le sifflet du merle, dans un bois qui éclate en bourgeons », et il vit les armées du Brabant, en route vers la bataille, pour la cause de la Liberté ^. Ces premières émotions si pures et si radieuses couronnèrent ses dispositions républicaines. Il fut gagné à la Révolution Française.

« Il n'y a pas de cœur anglais qui ne bondisse de joie, en apprenant que vous êtes tombées », avait dit Cowper aux murailles de la Bastille. La Bastille s'écroula. Voici comment Wordsworth salua ce que son prédé- cesseur avait prédit. C'est une magnifique explosion de lyrisme contenu. La traduction ne saurait rendre le mouvement croissant, la ferveur pro- fonde de ce morceau, et cependant, il est, à travers tout, vivant ; il palpite d'une allégresse que rien ne peut entièrement effacer. L'élan d'espérance qui sortit de cette chute est admirable, et éclate en un des hymnes les plus puissants que la poésie ait jamais chantés.

Tout à coup, la terrible Bastille,

Avec toutes les chambres de ses tours horribles,

Tomba à terre, renversée par la violence

De l'indignation ; et avec des cris qui étouffèrent

Le fracas qu'elle fil en tombant ! De ses débris

S'éleva ou sembla s'élever un palais d'or.

Le siège assigné de la loi équitable,

D'une autorité douce et paternelle. Ce choc puissant

Je le ressentis ; cette transformation je la perçus

Et la saisis, aussi merveilleusement que, au moment

Où sortant d'un brouillard aveuglant, j'ai vu,

Comme une gloire au-dessus de toutes les gloires jamais vues,

Le ciel et la terre se mélanger jusqu'à l'infini,

Eblouissant mon âme. Cependant des harpes prophétiques

Résonnaient de toutes parts : « La Guerre cessera,

N'avez-vous pas entendu que la conquête est abjurée ?

Apportez des guirlandes, apportez, apportez des fleurs choisies, pour orner

L'arbre de la Liberté ! >> Mon âme bondissait,

1 Wordsworth. The Prélude, Book vi.

2 "Wordsworlh". The^Preludey Eook vi, les derniers vers.

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