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Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/235

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Là, à Vienne, ou à Versailles,

11 délabre la vieille succession de son père ;

Ou bien il prend le chemin de Madrid,

Pour racler des guitares et voir battre des taureaux ;

Ou bien il s'enfonce sous des avenues italiennes,

Chassant la catin dans dos bosquets de myrtes;

Et puis, il va boire des boueuses eaux allemandes,

r Pour engraisser et s'éclaircir le teint,

Et se purger des conséquences fâcheuses, •»

Dons d'amour des signoras de Carnaval. Le bien de l'Angleterre ! — dis sa destruction Par la dissipation, la discorde et les factions! i

Puis il s'en prend à l'oisiveté de ces inutiles. Il représente les gentlemen et, pis encore, les Ladies, tourmentés du manque d'occupation. Ils flânent, las de leur inertie. Encore que rien ne les trouble, ils sont malheureux.

Leurs jours insipides, ternes et sans goût,

Leurs nuits inquiètes, longues et sans repos,

Même leurs sports, leurs bals, leurs courses de chevaux.

Leurs promenades à cheval dans les endroits publics.

Il y a tant de parade, de pompe et d'apprêt,

Que le plaisir peut à peine atteindre leurs cœurs.

D'une main de plus en plus brutale, il arrache les voiles, il montre les débauches des hommes, les médisances des femmes, les nuits passées au jeu, cette passion des dames du xvin^ siècle dont Thackeray a laissé un joli tableau dans ses Virginians ; enfin , les tricheries. Rien n'y manque. On dirait une des cruelles peintures de Hogarth. C'est la même précision et la même vigueur de trait.

Les hommes, qui se sont querellés dans leurs exercices.

Se réconcilient dans une débauche profonde ;

La nuit, ils sont ivres de boisson el de pulasserie,

Le lendemain, la vie leur est intolérable.

Les dames, se tenant par le bras en groupes.

Grandes et gracieuses ont l'air de sœurs.

Mais écoutez ce qu'elles disent des absentes,

Elles sont toutes des démons et des folles.

Tantôt, au-dessus de leur petite tasse et de leur soucoupe.

Elles dégustent et goûtent un peu de médisance ;

Ou bien , le long des nuits , avec des airs pinces ,

Elles restent penchées sur les diaboliques caries peintes,

Risquent les meules d'un fermier sur un coup, Et trichent comme un gredin qui n'est pas encore pendu 2.

1 The twa Dogs.

2 Id. Voir aussi sur la passion du jeu chez les dames au xviii" siècle, dans les Lelters from a Citizen of Ihe World, de Goldsmith, la lettre ci, The passion of Gaming among ladies ridiculed.