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Ni du ciel, ni de l'enfer!

Eslimanl et jugeant

Que ce n'est qu'une histoire vaine !

Résignons-nous donc joyeusement ; Ne rendons pas nos minces plaisirs plus petits,

En gt^niissant sur notre sort ;

Quand bien même les malheurs viendraient,

Moi, qui suis assis ici, j'en ai rencontré.

Et je leur sais gré après tout.

Ils donnent l'esprit de l'âge à la jeunesse,

Ils nous forcent à nous connaître.

Ils nous font voir la vérité nue ,

Le vrai bien et le vrai mal.

Bien que les pertes et les traverses

Soient des leçons bien sévères,

On y trouve une expérience.

Qu'on ne trouverait nulle part ailleurs

Mais, croyez moi, Davie, as de cœurs !

(En dire moins serait faire tort aux cartes ,

El je déteste la flatterie)

Cette vie a des joies pour vous et moi,

Et des joies que les riche -ses ne peuvent payer.

Et des joies qui sont les meilleures.

Il y a tous les i)laisirs du cœur,

L'amante et l'ami ;

Vous avez votre Meg plus chère que vous-même,

Et moi, ma Jane bien aimée !

Cela m'échauffe, cela me charme ,

Rien que de dire son nom ,

Cela m'embrase, cela m'allume,

Et me met toul en flammes ^.

On doit convenir, à la vérité, que cette façon de se consoler des mauvais procédés du sort ne s'applique pas à la vie réelle et n'est pas durable. C'est l'insouciance de la jjierre qui roule. C'est un peu la fanfaronnade d'un célibataire, et qui est jeune : il faut être seul pour voyager de la sorte à l'aventure, pour repartir sans cesse de partout sans souci d'arriver nulle part ; il faut avoir un corps vaillant pour coucher sur les revers des talus ou sur le foin des granges. Si on rencontre quelques vieux vagabonds philosophes qui restent satisfaits de cette vie buisson- nière, ils sont rares.

En tout cas, dès que le sort nous a fixés à un endroit, et que des enfants nous ont attachés au mur, comme les vrilles de la vigne ; dès que le corps se casse, ces rêves de gueux satisfait ne servent plus à rien. Cette gaîté de bohémien ne saurait être un remède pour ceux qu'une famille

1 Epïstle lo Davie.