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Mais mon amoureux ne sait pas que je sais fort bien

Que ma dot est le joyau qui a des charmes pour lui.

C'est pour la pomme qu'il veut nourrir l'arbre,

C'est pour le miel qu'il veut soigner l'abeille ;

Mon gars esl tombé si amoureux de l'argent,

Qu'il ne peut pas lui rester un peu d'amour pour moi*.

Les hommes sont après tout maîtres de se marier comme il leur semble bon. Ceux qui apprécient à la vergée la beauté de leur future et qui épousent des prairies et des bois sont clairsemés en somme. Qu'il leur advienne ce qui voudra ! Quand le mariage leur rapporterait un peu plus de bois qu'ils n'y comptaient, c'est une faible erreur de calcul. Ils ont simplement la large mesure. iMais il se rencontre de braves garçons qui, avec de bons bras, sont prêts à nourrir une belle fille. Ceux-ci sont encore les plus nombreux. Aussi les pièces qui roulent sur la recherche de la dot sont-elles assez rares du côté masculin.

Mais que le côté féminin en est riche ! Que les femmes sont bien plus à plaindre ! A la merci du premier venu auquel il plaît à leur famille de les accorder ! Quel défilé de pauvres filles qu'on veut faire marier à contre cœur. Les parents sont partout les mêmes. Ils sont pour le bonheur en terre et les gendres fonciers.

Combien cruels sont les parents

Qui n'estiment que la richesse,

Et à un riche lourdaud

Sauriflent la pauvre femme !

Cependant, la tille malheureuse

N'a que le choix de la lutte :

Fuir la haine d'un père despotique,

Devenir une épouse malheureuse 2.

Et la chanson continue en comparant la pauvrette à une colombe poursuivie par un faucon. Elle fuit un moment, essaye ses ailes, et désespérant d'échapper, tombe aux pieds du fauconnier qui représente le mari. Sur ce thème, à moitié comique et à moitié douloureux, Burns esl intarissable. Il y a à grouper, autour de ce seul point, une quinzaine de chansons avec lesquelles on constituerait toiites les phases de cette aventure commune, depuis les premières instances des parents jusqu'au moment oîi les résultats ordinaires de pareils mariages commencent à poindre. Les hésitations, les combats, les refus, les chagrins des pauvrettes y sont tout au long. Elles demandent conseil tout autour d'elles et ce sont de petites scènes charmantes de naïveté et de malice.

L'une d'elles va trouver sa sœur : son cœur se brise, elle ne veut

^ My Tocher's the Jewel.

2 How cruel are the Parents.