Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/221

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

époque dans le Midi. L’influence de ces différents ordres, concourant à une fin commune, a transformé les mœurs. Si elle n’a pas renouvelé le goût des choses de la religion, qui avait même été la cause de l’hérésie, elle l’a dirigé dans la voie régulière de l’orthodoxie[1].

D’autre part la création de ce redoutable tribunal d’exception que fut l’Inquisition y contribua par des moyens plus rudes. Le sentiment religieux s’est développé et le domaine de la poésie religieuse s’est agrandi du même coup. Cent ans ou même un quart de siècle auparavant elle aurait trouvé peu d’écho dans la société. Les poésies religieuses de la période qui précède la croisade contre les Albigeois s’expliquent par des raisons particulières à chaque poète plutôt que par des causes générales. Il n’en est plus de même maintenant. Les poètes suivent le goût du jour ; aussi le nombre des poésies religieuses est-il grand pendant cette période de décadence.

Mais on a remarqué que parmi les poésies lyriques consacrées à louer « Dieu, la Vierge et les Saints », les chansons à la Vierge devenaient de plus en plus nombreuses pendant le xiiie siècle. Le nom de la Vierge n’apparaissait pas chez les troubadours de la période précédente.

Peire Cardenal est un des premiers à écrire en son honneur ; mais sa poésie (comme une autre du troubadour Perdigon) est dans le ton des prières de l’Église. Après lui le nombre de ces poésies va en augmentant pendant le xiiie siècle[2].

  1. En 1207 saint Dominique fonde le couvent de Prouille. C’est l’époque où se fondent les confréries (laïques) du Rosaire qui ont tant contribué à répandre le culte de la Vierge. Cf. Lowinsky, op. laud., p. 12 du tirage à part.
  2. Cf. pour tout ce qui suit notre étude sur le troubadour Guiraut Riquier, p. 284 et suiv.