Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/222

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Ce fait est une preuve de l’influence exercée par saint Dominique et ses disciples. Les confréries du Rosaire avaient été fondées en même temps que l’Inquisition, et le culte de la Vierge, qui n’existait pas auparavant d’une manière indépendante, s’était rapidement développé. Ce culte se présentait avec un charme et une grâce que celui de la Trinité ou même du Christ, Rédempteur des hommes, n’offrait pas au même degré. La Vierge était l’avocate des pécheurs, elle était l’intermédiaire indulgente entre les hommes et son fils.

« La Vierge, dit Pierre de Blois, est la seule médiatrice entre l’homme et le Christ. Nous étions des pécheurs et nous redoutions de faire appel au Père, car il est terrible ; mais nous avons la Vierge en qui il n’y a rien de terrible, car en elle est la plénitude de la grâce et de la pureté. » « En fait s’écrie le même théologien, si Marie était exclue du Ciel, il ne resterait plus au genre humain que la noirceur des ténèbres. »

Son culte se répandit rapidement dans le Midi de la France. Les poésies à la Vierge se multiplièrent sous l’œil bienveillant de l’Église, jusqu’au jour où elles furent les seules poésies permises, ou du moins les seules qui eussent des chances de plaire.

Seulement la littérature provençale n’avait déjà plus la vie nécessaire pour créer les formes nouvelles qui convenaient à ce genre nouveau ; la lyrique religieuse prit la forme de la lyrique profane, toute la