Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/24

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plus alerte, et surtout la vie plus facile et plus large. Ceci est possible : ce qui est moins probable c’est que le climat y soit pour quelque chose, comme l’ont cru trop d’historiens étrangers qui voient les pays du Midi, qu’il s’agisse de la Grèce, de l’Italie ou du Midi de la France, à travers leur rêve d’hommes du Nord.

Ce qui est certain enfin c’est que dès les débuts la poésie provençale refléta les idées et les mœurs de ces milieux. C’est dans la conception de l’amour surtout que ces idées diffèrent de celles des âges précédents et que la société féodale méridionale est en avance sur celle du Nord. Les idées chevaleresques du temps avaient contribué à relever la condition de la femme, comme l’avait fait jadis le christianisme. Elle devint dans la plupart des pays où se développa l’esprit de la chevalerie un objet de respect et d’adoration. C’est dans le Midi de la France que cette évolution se produisit d’abord avec le plus d’éclat. Les troubadours ont créé par leur théorie de l’amour courtois un véritable culte de la femme. Le mot ne paraîtra pas trop fort, quand nous aurons examiné cette théorie, que nous en aurons étudié le développement et que nous verrons l’amour profane ainsi conçu se transformer presque insensiblement en dévotion à la Vierge. Cette évolution est régulière ; elle est sortie sans effort de la conception primitive.

C’est le développement de ce thème de l’amour courtois qui a fait l’originalité de la poésie des troubadours. C’est à lui qu’elle doit et son éclat et son influence sur tous les pays où ont pénétré les idées