Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/295

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causent à la poésie les misérables chanteurs de rue qui la représentent aux yeux du vulgaire ; il voit là une sorte de profanation, contre laquelle il proteste avec une indignation éloquente.

Que pouvait-il advenir de cette requête et du décret qui en fut la conséquence ? C’était un acheminement vers la création d’écoles fermées, comme il y en eut dans le Nord de la France et surtout en Allemagne, où les « maîtres chanteurs » formèrent, en particulier à Nüremberg, des corporations. Dans le Midi la poésie n’avait plus assez de vie pour permettre la fondation de ces écoles chères, dans toutes les littératures, aux épigones.

Riquier quitta vers 1279 la cour de celui qu’il appelle le « bon roi de Castille ». Les dernières années de la vie d’Alphonse X ne furent qu’une série de déboires ; il eut à combattre les grands ; son fils aîné se déclara contre lui et il fut réduit après avoir fait un vain appel aux rois de Portugal, de France et d’Angleterre à implorer le secours des musulmans. Riquier garda de lui un souvenir ému : « Depuis que je perdis le glorieux roi qui m’aimait tant, Alphonse de Castille, je n’ai pas trouvé de seigneur qui appréciât mon talent et qui me sût si bien honorer qu’il me retirât de la misère. »

Il en trouva un cependant en la personne du comte de Rodez, Henri II. Les seigneurs de ce comté avaient été de tout temps les protecteurs des troubadours et se piquaient eux-mêmes de poésie. Pendant la dernière période de la décadence il y eut