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LOUIS BOUILHET

successivement, et par ordre de dates, les œuvres d’un écrivain., d’en contrôler les inspirations, d’assister chaque jour aux progrès de sa pensée, de surveiller avec une attention assidue la floraison et l’épanouissement de son talent.

Les fruits de pareilles observations, sont la variété dans l’étude et le raffinement dans l’instruction, la subtilité dans le coup d’œil et la précision dans la curiosité, l’acuité dans les perceptions et la finesse dans le jugement. Quel spectacle vaut celui d’une intelligence aux prises avec l’inspiration ? Il permet d’assister à la révélation des mystères de l’enfantement poétique, au développement et à l’élargissement régulier d’une nature privilégiée. Une sympathique familiarité s’établit entre le poète et son juge, et ce dernier arrive peu à peu à cette fraternité intellectuelle qui permet de faire entendre les sentences d’un ami d’autant plus sévère qu’il est devenu plus intime.

Nous n’avons pas la prétention d’avoir, en méditant l’œuvre de Louis Bouilhet, rencontré exactement toute la vérité, ce trésor merveilleux si difficile à trouver tout entier. Mais n’aurions-nous rencontré que quelques parcelles de la vérité, que nous serions encore heureux de les avoir recueillies. Nous nous contenterons de ce résultat. D’autres seraient peut-être plus difficiles à satisfaire. L’esprit humain n’a jamais été si inventif que de nos jours. — Les savants font merveille avec leurs découvertes, mais certains littérateurs n’ont rien à leur envier. Sous le prétexte d’arriver à la vérité complète, on a inventé récemment ce qu’un maître de la critique a appelé « la littérature indiscrète » qui spécule le plus souvent sur « les curiosités profanes ou l’indifférence avide de scandale. »[1] La tombe s’est-elle à peine

  1. M. Cuvillier-Fleury