Page:Annales de la propagation de la foi, Tome 19, 1847.djvu/298

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que de décrire en détail la marche et les mouvements de cette grande caravane, qui s'en allait par troupes et par pelotons à travers le désert, s'arrêtant tous les jours dans les plaines, dans les vallées, aux flancs des montagnes ; tous les jours improvisant avec ses tentes, si nombreuses et si variées, des villes et des villages qui s'évanouissaient le lendemain pour reparaître encore le jour d'après. Quel étonnement pour ces vastes et silencieux déserts de se voir tout-à-coup traversés par une multitude si bruyante et si nombreuse !

« Après quinze jours de marche parmi les magnifiques plaines du Kou-kou-noor, nous arrivâmes chez les Mongols du Tsaidam. Le pays est infécond et sauvage. Le terrain aride et salpètreux produit à peine quelques broussailles desséchées. Cette nature si triste et si morose semble aussi avoir gagné le cœur des habitants. Ils paraissent tous avoir le spleen ; ils parlent peu et leur accent est très-guttural. Nous rencontrâmes dans le pays de Tsaidam quelques restes de lamazeries qui, depuis peu de temps, avaient été dévastées et incendiées par les brigands.

« L'abattement fut général, quand nous arrivâmes aux pieds de la montagne Borhan-bota qui, disait-on, se trouve toujours enveloppée de vapeurs pestilentielles. Avant d'en commencer l'ascension, chacun prit les mesures sanitaires enseignées par la tradition et qui consistent à manger quelques grains d'ail. Enfin on se hasarda à grimper sur les flancs du Borhan-bota. Mais bientôt les chevaux se refusent à porter leurs cavaliers ; chacun va donc à pied, marchant à petit pas. Insensiblement tous les visages blanchissent, le cœur s'affadit et les jambes ne peuvent plus fonctionner. Mon Dieu, quelle misère ! on est anéanti, brisé, et pourtant il faut encore ramasser toute son énergie pour assommer les