Page:Annales de la propagation de la foi, Tome 19, 1847.djvu/304

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marchand thibétain : la puissance de ses prières est infinie. » Le Kolo porta aussitôt ses deux mains jointes au front, adressa quelques paroles à voix basse au marchand thibétain ; puis, ayant fait un signe à ses compagnons de brigandage, ils montèrent tous à cheval, partirent au grand galop et disparurent derrière les montagnes. « N'allons pas plus loin, nous dit le marchand thibétain, dressons ici notre tente. Les 'Kolo sont des brigands, mais ils ont le cœur grand et généreux ; quand ils verront que nous restons sans peur entre leurs mains, ils ne nous attaqueront pas ; d'ailleurs, ajouta-t-il, je crois qu'ils redoutent beaucoup la puissance des lamas du ciel d'occident. » Sur son avis, nous n'allâmes pas plus loin et nous dressâmes la tente. Pendant la nuit nous dormîmes d'un œil seulement, et le lendemain nous continuâmes en paix notre route. Parmi les voyageurs qui se rendent à Lassa il en est peu qui puissent se vanter d'avoir vu les fameux Kolo de si près sans en avoir reçu aucun mal.

« Nous venions d'échapper à un grave danger, mais il s'en préparait un autre plus formidable, nous disait-on, quoique d'une nature différente. Nous commencions à gravir la vaste chaîne des monts Tanla. Au dire de nos compagnons de voyage, tous les malades devaient mourir sur le plateau, et les bien portants y endurer une forte crise. M. Gabet avait été irrévocablement condamné à mort par les gens à expérience. Après six jours de pénible ascension, nous arrivâmes enfin sur ce fameux plateau, le point peut-être le plus élevé du globe. Nous apercevions comme à nos pieds les pics et les aiguilles de ces immenses massifs dont les derniers rameaux allaient se perdre dans l'horizon. Nous voyageâmes pendant douze jours sur les hauteurs du Tanla, et par bonheur nous n'eûmes jamais de mauvais temps.