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nition des couleurs qui n’éxistent que dans la lumiére réflechie et modifiée par les surfaces des corps. Les couleurs ne sont rien par elles mêmes et sans le concours de la lumiére ; si la proposition de Beccher étoit vraie, tous les corps nous seroient visibles dans les ténèbres. Que la seconde terre soit donc le principe des couleurs, c’est ce dont on ne peut guéres disconvenir sur les preuves dont ce sentiment est appuyé : mais qu’elle ne les produise que par des modifications de la surface des corps, c’est ce qu’on est encore plus obligé de croire en saine Philosophie.

Au reste, on ne doit pas croire que ce principe soit toujours sous une forme terreuse ou aride, quelquesfois il nage sur la surface des Eaux qu’il colore diversement comme une teinture métallique. Beccher dit qu’ayant reduit en huile différens metaux pour travailler à la mercurification, une seule goutte de cette huile (29) êtoit capable de teindre une surface d’eau de trois pieds de Diamètre, de sorte qu’on eut pris toutte cette eau pour une teinture d’or ou d’argent, ce qui causoit de tels ravissemens à nôtre bon Allemand qu’il en préferoit, dit-il, le plaisir à celui de boire mille rasades[1]. Quelque fois cette terre s’exhalant en vapeurs s’unit en consistance huileuse avec le troisième Principe et coule dans certaines vieilles cavernes minerales que les Allemands appellent Zachen[2]. Que si la prémiére terre vient à s’y joindre, le tout se coagule aussi tôt et prend l’état métallique ou pierreux suivant la manière dont s’y trouve combiné le troisième principe dont nous parlerons dans un moment.

Quoique le flogistique se trouve uni en différente quantité à la pluspart des corps, il réside principalement dans l’air comme dans son siége naturel, et c’est lui qui communique aux vapeurs qui s’y êlévent ces qualités vivifiantes qui ferti-

  1. Spectaculum sane jucundius, quam si quis mille pocula ebiberet. Becher, Phys. subt., p. 73.
  2. Fluit, præsertim in minerarum antris antiquioribus, vulgo Zächen. Becher, Phys. subt., p. 73.