Page:Annales de la société Jean-Jacques Rousseau, tome 25.djvu/28

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ger, attendu qu’elle savait lui persuader que c’était lui qui le voulait et que c’était elle qui ne le voulait pas[1].

Cette jolie peinture de vie conjugale nous fait un peu comprendre comment tant de femmes du dix-huitième siècle, sans s’être séparées de leur mari, ont pris un amant qu’elles ont souvent gardé toute leur vie et n’en ont pas moins été considérées comme d’honnêtes femmes. De semblables mariages faits sans la participation de leur volonté ne pouvaient conduire qu’à l’indifférence entre époux.

Mme d’Epinay, Mme de Boufflers, Mme d’Houdetot, pour ne citer que les femmes qui ont vécu dans le sillage de Rousseau, se trouvaient dans ce cas. Mme d’Houdetot avait été mariée très jeune contre son gré. Elle trouva dans Saint Lambert « tous les mérites de son mari avec des qualités plus agréables, de l’esprit, des vertus, des talents nous dit Jean-Jacques, et il ajoute « S’il faut pardonner quelque chose aux mœurs du siècle, c’est sans doute un attachement que sa durée épure, que ses effets honorent et qui ne s’est cimenté que par une estime réciproque[2]. »

Mme d’Houdetot ne cachait point Saint Lambert à son mari : « Mon mari me connaît et m’estime, il peut penser que mon cœur est tendre et excuser en moi une faiblesse dont il se doute peut-être et qui ne le rend pas malheureux. »

Puisque ces aimables femmes n’avaient point été consultées avant leur mariage, peut-être faut-il être

  1. Confessions. Livre X, p. 94. T. III (Ed. Taillandier). C’est cette édition que nous citerons au cours de notre étude.
  2. Confessions. Livre IXe. T. II, p. 2.