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JUGEMENT

le composent soit supérieure à autant de fois le poids de l’opinion d’un juge du premier qu’il y a des juges dans celui-ci.

Si l’on suppose que le premier des deux tribunaux n’a qu’un seul juge, on voit qu’alors, pour si peu que les juges du second tribunal soient plus éclairés que ce juge unique, nos conditions se trouveront remplies ; c’est le cas des appels, devant les tribunaux de première instance, des jugemens rendus par nos juges de paix.

Nos tribunaux de première instance étant eux-mêmes composé. de trois juges, on voit, par notre formule que, pour qu’un jugement rendu sur appel de ces tribunaux par nos cours royales puisse, dans tous les cas, être réputé conforme à l’équité, il faut admettre que les juges de ces cours ont une capacité plus que triple de celle des juges de première instance. C’est au lecteur à décider s’il pense qu’il en soit toujours ainsi.

Nous avons eu, durant plusieurs années, en France, un système de tribunaux civils, égaux en attribution, et tribunaux d’appel, les uns à l’égard des autres. Il est clair qu’alors on n’avait aucun motif de préférer l’opinion des juges de l’un de ces tribunaux à celle des juges de tout autre. Un tel ordre judiciaire était donc essentiellement vicieux, bien qu’on eût pris la précaution, autant que nous pouvons du moins nous en rappeler, de faire prononcer les jugemens sur appel par cinq juges. On voit, en effet, qu’après avoir gagné un procès en première instance à l’unanimité de 3 voix, on pouvait ensuite le perdre en appel, à la simple majorité de 3 voix contre 2 ; de sorte qu’on se trouvait condamné, bien qu’on eût eu 5 voix en sa faveur, et 3 seulement contre soi. Voilà à quoi peuvent être exposés les citoyens, avec des législateurs étrangers, pour la plupart, aux premières notions du calcul ; et il continuera d’en être ainsi tout aussi long-temps qu’on persistera à ne considérer l’étude des sciences exactes que comme propre seulement à former des artilleurs, des ingénieurs, des astronomes et des marins.

J’ai supposé tout-à-l’heure que le jugement du second tribunal n’était rendu qu’à la simple majorité. Supposons présentement qu’il