Page:Annales de philosophie chrétienne vol 40, 1850.djvu/282

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travail, sans rien poursuivre, sans rien obtenir, sans se fixer dans aucun rang : il parvient de lui-même au sommet et se nomme la voie(282-D).

3. — Bouddha, manifestant sa doctrine, prononça ces mots : Le Charmana qui, ayant rasé ses cheveux et sa barbe (282-1), a été initié aux prières de Bouddha, doit rejeter loin de lui les richesses du monde ; cheminant le badir(282-2) à la main, au milieu du jour, un repas frugal lui suffit ; il prend son sommeil, sous un arbre. Jamais, sous aucun prétexte, il n’ose rompre son jeûne, et il est plein d’affection pour les hommes qui le regardent comme un imbécile et un insensé (282-E).

4. — Bouddha, manifestant sa doctrine, prononça ces mots : Il y a pour les vivans 10 espèces d’actes qu’on nomme mauvais. Si vous demandez : Ces 10 mauvais actes, quels sont-ils ? Il y en a 3 qui appartiennent au corps, 4 à la parole, 3 à la volonté. Les 3 du corps sont : le meurtre, le vol, l’impudicité… Les 4 de la parole sont : les discours qui sèment la discorde, les malédictions outrageantes, les mensonges impudents, les paroles hypocrites…

(282-D). Voilà déjà l’apothéose de l’homme déduite logiquement de la seule contemplation de son propre cœur. C’est logique : si l’homme n’a besoin que de rentrer dans lui-même pour y trouver l’intelligence de la nature incréée de Dieu, cet homme-là n’a plus rien à chercher : il a Dieu en lui, il peut s’appeler la voie, comme le Christ ; comme lui il peut se dire Dieu. Nos philosophes, qui prétendent trouver en eux Dieu, l’infini, le vrai, le faux, le bien, le mal, la voie enfin, et qui pourtant s’appellent encore hommes, ont tort : dans la réalité, ils sont dieux. Avis à nos professeurs de philosophie dite catholique qui fabriquent ainsi la religion et la morale naturelles sans l’intervention de la tradition.

(282-E). On remarquera cette dernière prescription qui est très-belle et presque évangélique.

(282-1). Tout homme qui fait profession de Lama se rase entièrement les cheveux et la barbe pour exprimer qu’il rejette entièrement les superfluités du monde. Les hommes du monde s’appellent hé-Jen, hommes noirs, termes qui répondent au mot laïc de la langue française.

(282-2). Le Badir est un petit vase en airain que les lamas tiennent à la main lorsqu’ils vont recueillir des offrandes. Tout dévot bouddhiste se fait un bonheur de pouvoir déposer quelque présent dans le Badir.