Esperen dans la carrière pomologique, lorsque à son retour dans ses foyers, après les périlleuses campagnes de l’Empire, il vint se consacrer exclusivement à la recherche et à la culture de nouvelles variétés fruitières ; recherches dont le professeur Van Mons avait si bien fait comprendre la nécessité pour reconstituer les fruits en général, et en particulier le genre poirier, plus disposé que la plupart des autres espèces à s’altérer et à dégénérer rapidement.
» Le Soldat laboureur a été obtenu par M. Esperen, vers l’année 1820, d’un semis fait dans un de ses rares congés. C’eût été un grand pas de fait pour la science, que de connaître de quelle variété de poires M. Esperen a semé, et l’époque du semis, afin de savoir s’il est parti du même principe que MM. Van Mons et Bouvier, ou si, partant du principe opposé, il est arrivé au même résultat. Malheureusement, il paraît qu’aucune note n’a été tenue à cet égard. »
L’arbre est vigoureux et le bois en est solide ; il forme, sans peine, de superbes pyramides, et réussit également bien sur franc et sur coignassier ; ses branches ont une tendance naturellement verticale. Cette variété, cultivée en espalier, peut être exposée au midi, au levant, au couchant et même au nord ; mais à cette dernière exposition, où elle ne se gerce pas, la maturité est retardée jusqu’en janvier, et le fruit n’est ni aussi fin ni aussi sucré qu’aux trois autres. Dans les conditions ordinaires, la maturité progresse régulièrement et lentement du mois d’octobre jusqu’à la fin de novembre.
La poire Soldat laboureur est pyriforme, ventrue et rétrécie vers le calice ; elle est habituellement de grosseur moyenne, mesurant de 8 à 9 centimètres de hauteur sur 6 à 7 de diamètre ; nous en avons vu cependant de beaucoup plus grosses, récoltées sur des arbres très-vigoureux ou sur des espaliers.
La peau est unie, vert-clair, passant au jaune-doré lorsque le fruit est parfaitement mûr ; elle est pointillée et ombrée de fauve, surtout autour du pédoncule et du calice ; celui-ci, placé dans une cavité peu profonde, est couronné ; ses divisions sont grises et cotonneuses.
Le pédoncule, long de 3 à 4 centimètres, est ligneux, ridé, brun-clair taché de vert ; il est placé dans une cavité étroite et peu profonde.
La chair est blanc-jaunâtre, demi-fine, fondante ; l’eau est abondante, sucrée, parfumée, et dans les terrains qui lui conviennent elle est de plus très-vineuse.
Les rameaux sont gros, longs, droits, lisses, de couleur grise ; parsemés de nombreuses lenticelles rondes, blanc-sale et inégalement disséminées ; la seconde pousse, souvent plus longue que la première, a l’épiderme rouge-violacé du côté du soleil, brun-verdâtre de l’autre ; ces rameaux sont cotonneux, fléchis, coudés, renflés vers leur sommet et souvent marqués de deux stries latérales à partir de l’insertion des gemmes ; ceux-ci, triangulaires, pointus, sont portés à la base du rameau sur un renflement notable, qui les en écarte entièrement.
Les mérithalles, assez rapprochés, sont irrégulièrement espacés.
Les branches à fruit sont grosses et courtes.
Les boutons à fleurs, assez gros, ovales-allongés, pointus, écailleux, brun-clair ombré de brun-marron et de gris, ont leur support moyen, ridé, gris à la base, légèrement renflé, brun-clair et lisse à l’extrémité.
La feuille, longue de 5 à 6 centimètres, large de 3 à 4, est ovale-allongée, pointue ou plus souvent plane, d’un vert-foncé, ordinairement ondulée et finement serretée ; elle est portée par un pétiole très-long, mesurant parfois jusqu’à 7 centimètres, mince, cannelé et vert-jaunâtre.
Le Soldat laboureur ne porte pas souvent ses fruits par groupes ou trochets, mais ses fleurs nouent facilement ; de sorte que cette variété peut être considérée comme très-fertile. À l’automne, les poires tiennent longtemps et solidement à l’arbre, et résistent bien à l’action des vents, jusqu’au moment de la cueillette ; elles ne blettissent pas et leur maturation est très-lente ; c’est pourquoi on a toutes les facilités pour tirer bon parti de sa récolte.
