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LA THÉOSOPHIE BRAHMANIQUE

générales. La Śvetāśvatara-Upaniṣad demande qu’on choisisse une localité où rien ne vienne déranger la pensée, et Manu veut qu’on s’assoie pour méditer[1]. Les écrits qui se rattachent au Rāja-yoga sont plus précis ; cependant leurs prescriptions se maintiennent encore dans les limites raisonnables. Non seulement on n’y trouve rien qui soit contraire à l’hygiène de l’esprit ou du corps, mais encore les règles qu’on donne sont bien appropriées au but qu’on se propose : une hutte placée dans un site agréable, et aménagée de manière à protéger le yogin contre la chaleur, les bêtes et les gens malintentionnés[2] ; une posture telle qu’on puisse la garder le plus longtemps possible[3] sans fatigue ; une alimentation simple, suffisamment abondante, conforme aux prescriptions de la médecine indigène[4].

  1. Comme on voit, ces règles ne sont nullement spéciales à l’école du Yoga. Śankara recommande aussi de se tenir assis pour rendre un culte à la divinité. Les raisons qu’il en donne sont évidemment les mêmes qui ont fait adopter cette posture pour la méditation : « Le culte, dit-il, doit développer une adhésion (pratyaya) accompagnée de respect. Si l’on marche ou si l’on court, cet effet ne se produit pas, car la marche sous ses diverses formes dissipe l’esprit ; si l’on se tient debout, le sens interne est obligé de soutenir le corps et n’est plus en état de contempler les objets subtils ; si l’on est couché, on risque de s’endormir » (Ved. S., p. 1071).
  2. La Haṭha Yoga Pradīpikā donne, pour l’emplacement et la disposition de la cellule, les indications que voici : « Le yogin doit placer sa hutte dans un lieu solitaire, à la portée d’une flèche de ce qui est rocher, feu et eau, dans un pays sûr et fertile, bien gouverné et observateur de la loi. — Une petite porte ; pas de fenêtre, ni de trou, ni de fente ; ni trop haute, ni trop basse ; propre et soigneusement crépie d’une couche épaisse ; point de vermine ; extérieurement un abri, un foyer, un puits ; tout autour un mur d’enceinte : tels sont les caractères de la hutte (maṭha) des yogins appliqués au haṭha-yoga » (I, 12 et 13). Il va sans dire que les règles sont valables aussi pour le rāja-yoga.
  3. Sthira-sukham-āsanam, Y. S. II, 46.
  4. On trouvera dans H. Y. Pr., I, 58 ; 59 ; 60 ; 62 ; 63, les prescriptions relatives au régime alimentaire du yogin. D’une manière générale, il doit peu manger (mita-āhāraḥ), et laisser vide le quart de son estomac ; il doit éviter tout ce qui est acide, aigre, salé, fortement épicé, indigeste, trop chaud ; on lui défend, par exemple, la noix de bétel, l’huile de sésame, l’ail, le poisson, la viande, le lait caillé, les mets réchauffés. On lui permet le froment, le riz, l’orge, le lait, le beurre, le miel, l’eau pure. « Qu’il prenne une nourriture suffisante, douce, agréable à son cœur, profitable à ses humeurs »