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ANNALES DU MUSÉE GUIMET


politique qui marque la période arsacide, et une réaction contre l’anarchie morale et sociale qu’entraîne l’anarchie politique.

Les Arsacides, pour être Rois des Rois, n’en étaient pas moins de simples chefs féodaux. Leur pouvoir n’a jamais été un pouvoir centralisé, comme le fut celui des Achéménides, comme le sera celui des Sassanides. Dans toutes les provinces sont installées des dynasties locales qui ne sont rattachées à l’Arsacide que par des liens très lâches et qui le reconnaissent tout au plus comme chef de guerre 1. Les historiens romains et grecs qui ne s’occupent d’eux qu’aux moments où ils sont en guerre contre Rome, c’est-à-dire aux moments où l’unité s’établit un instant par cela même, nous donnent parfois l’illusion d’une royauté iranienne : ce n’est qu’une illusion d’étranger. En particulier, dans le dernier siècle de la période arsacide, toute apparence de Roi des Rois disparaît. Le Parthe,le Pahlav comme on l’appelle, n’est que le plus puissant des Rois provinciaux, des Mulûk tavâif. On contait que quand Alexandre se sentit mourir, craignant la revanche de la Perse sur la Grèce, il consulta son vizir Aristote et, sur son conseil perfide, divisa la Perse entre quatre-vingt-dix princes, afin de la paralyser 2. C’est pour rétablir l'unité de l’Iran, pour rétablir la royauté de Dàrà (le dernier Darius), qu’Ardashîr se lève. Il supprime les Rois provinciaux qui ne veulent pas le reconnaître pour Roi des Rois et envoie leurs têtes au temple d’Anàhita. Une assemblée des Mages décide que ceux-là seuls garderont le titre de Shah, qui viendront déposer leur couronne aux pieds du Shàhinshâh et la recevoir à nouveau de ses mains 3. Quand Tannasar écrit sa lettre, il y a déjà quatorze ans 4 qu’Ardashîr a commencé son œuvre : une partie est accomplie ; il en reste une autre : il lui reste à tirer

1 . « Les Arsacides ne demandèrent pas obéissance aux Rois des provinces et ne les molestèrent en aucune façon ; seulement, quand un ennemi menaçait le royaume des Arsacides, ils réclamaient des Rois des provinces une armée que ceux-ci envoyaient de bonne grâce »> (Tabari, tr. Zoteriberg, II, 5).

2. Erân-shatro pun 90 kartak (ou kûtàh) khutdi kalkûnt (Grand Bund. ; cf. vol. I, 81, note 4).

3. Lettre de Tansar : cf. llamza d’Ispahan, l. I. — On trouvera la liste des principautés auxquelles il laissa un Shah dans Ibn Khordadbeh, éd. de Goeje, p. 17.

4. Le point de départ est sans doute l’année où Ardashir succède à son père, comme roi de la province de Perse, et qui semble être 211 ou 212. Quatorze ans plus tard, Ardavân avait probablement disparu : il succomba en 224 ou 226.