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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

Dans le temps où le docteur Sanjaya initia les deux fils de Brahmanes Upatiṣya et Kôlita, en ce temps-là ce bruit se répandit partout : Sanjaya a initié les fils de Brahmanes ; et il en retira beaucoup de profit et d’honneur.

Il fit cette réflexion : Jadis j’étais de la race de Çaṇṭila : maintenant encore je suis de la race de Çaṇṭila ; mais maintenant les profits et les honneurs affluent sur moi. Qu’est-ce que cette conjoncture ? — Cette autre pensée lui vint à l’esprit : Ceci n’arrive point par ma vertu ; cela arrive donc par la vertu de ces deux fils de Brahmanes. — Cette réflexion faite, comme son travail était de faire lire les écritures sacrées des Brahmanes à cinq cents fils de Brahmanes, il confia deux cent cinquante de ces enfants à l’un d’eux et en confia deux cent cinquante à l’autre.

2. MORT DE SANJAYA

Plus tard le docteur Sanjaya étant tombé malade, Upatiṣya dit à Kôlita : Kôlita, est-ce toi qui soigneras le maître, ou bien iras-tu chercher les remèdes ? — Kôlita fit cette réflexion : (il est préférable) que celui-ci, en raison des connaissances spéciales qu’il a, s’applique à soigner le malade ; moi, j’irai chercher les remèdes. Il dit donc (à Upatiṣya) : Toi, prends soin du maître ; moi, je lui procurerai les remèdes.

Upatiṣya s’étant mis à soigner le malade, Kôlita alla lui chercher des remèdes. On lui administra force plantes, racines, feuilles, fleurs, graines médicinales ; le malade n’éprouva pas de mieux : bien plus, il s’affaiblit, puis fit voir un sourire.

Le fils de Brahmane Upatiṣya dit : Maître, ce n’est pas sans cause, non, ce n’est pas sans cause que des hommes tels que toi, des hommes placés à la tête des autres, font un sourire ! Maître quelle est la cause de ce sourire, quelle en sera la conséquence ?

Il répondit : Upatiṣya, cela est vrai ; cela étant vrai, il s’en suit que des hommes tels que moi, des hommes placés à la tête des autres, ne rient pas sans cause ni sans effet.

En conséquence, par exemple, dans le Continent d’or[1] un roi nommé Suvarṇapati[2] vint à mourir et son épouse fut placée sur un bûcher. Je me pris

  1. Gser gling. Le sanskrit serait Suvarṇadvîpa.
  2. Je restitue ainsi en sanskrit le mot tibétain gser-bdag « roi de l’or ».