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INTRODUCTION. — CHAPITRE PREMIER

Quant au ms. M, il est celui de nos mss. qui présente les leçons les plus corrompues. Non seulement il y a dans ce ms. des fautes qui peuvent être considérées comme provenant de négligences de copiste ; mais encore le texte est d’un bout à l’autre altéré de telle façon qu’on est obligé d’admettre qu’un copiste a intentionnellement changé le texte qu’il avait devant lui. Mentionnons d’abord que M a omis un nombre considérable de vers, le plus souvent contenant des détails plus ou moins superflus pour la marche du récit [1]. Puis, les vers sont raccourcis d’une manière tout arbitraire, le copiste anglo-normand ayant visiblement, sans aucune intelligence de la nature des vers qu’il copiait, omis les mots qu’il jugeait inutiles [2]. Enfin, le grand nombre de rimes

  1. M compte 5382 vers ; P, qui a pourtant sauté deux laisses (voy. ci-dessus p. 14, n. 2) et perdu à la fin au moins cinquante vers (à partir du v. 6366), en compte 6240. Que ce soit M qui ait, en général, omis des vers, et non pas P qui en ait ajouté, c’est ce qui ressort surtout du fait que M donne quelquefois des laisses tellement courtes qu’elles n’ont certainement pas pu appartenir comme telles à l’original de LMPS. Telles sont les laisses XVI (vers 445-457 ; 9 vers manquent dans M), LXIV (vers 1864-1876 ; 8 vers manquent dans M) et CXXXIII (vers 3743-3758 ; 8 vers manquent dans M).
  2. Le fait que M donne quelquefois des vers de dix syllabes a conduit M. E, Freymond (Literaturblatt für germ. und roman. Philol., t. XIII (1892), col. 267) à supposer que M a pu dans sa versification conserver des traces d’une chanson perdue sur Florence de Rome en vers décasyllabiques. Mais, outre que notre classification démontre l’impossibilité d’une telle hypothèse, tout le caractère de la version de M indique suffisamment que les vers de dix syllabes qui s’y rencontrent sont des altérations postérieures. Une foule de vers métriquement impossibles prouvent que notre copiste n’a pas dû avoir une idée bien nette des règles de la versification française de son temps. Comme exemples de ces altérations nous donnerons quelques vers de la première laisse de notre chanson :
    v. 8 (4e vers. suppl.) : Turnus fist turs sur lewe | en vn pendans ;
    v. 10 : E rei babilonus | ke mut fu puissans ;