Page:Anonyme - Guillaume de Palerne.djvu/16

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des deux amants revêtus de peaux d’ours qu’ils échangent plus tard contre des peaux de cerf et de biche, leur rencontre avec la reine Felise qui vient les trouver sous un déguisement semblable ? Il en est de même de ce loup-garou qui, immédiatement après sa métamorphose, prend sa course à travers l’Europe jusqu’en Sicile, pour aller veiller sur la vie d’un jeune prince qu’il arrache à un péril imminent, dont plus tard il guide la fuite, et auquel il révèle le secret de sa naissance, lorsqu’il a recouvré la forme humaine. C’est bien là, sinon le héros, du moins le personnage principal de toute cette histoire, le Deus ex machina, dont l’intervention mène les événements à une heureuse issue. Aussi bien aurait-il pu donner son nom au roman, comme l’Escouffle qui le précède dans le manuscrit, ou comme le Bisclaveret dans le lai dont il rappelle immédiatement le souvenir ; il n’y a néanmoins aucune analogie entre les deux récits, et nous ne voyons pas comment M. Littré a pu, dans son analyse, en conclure l’antériorité du petit poëme de Marie de France. Il ne faut pas attribuer exclusivement à la Bretagne la croyance aux loups-garous ; on la trouve répandue dans toute l’Europe, non-seulement à cette époque, mais bien antérieurement dans plusieurs Sagas, dans l’antiquité, chez Virgile, et même jusque chez Hérodote. Ce n’est pas ici le lieu d’aborder une question si vaste et si compliquée : elle a été traitée par de nombreux auteurs, tout récemment par J. Grimm, Baring-Gould et Herz ; ces deux derniers notamment en ont fait chacun le sujet