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Sommaire.

quarante chrétiens qu’il y tient déjà. — Mais il se fait tard, et à la tombée de la nuit, dit Huon, c’est folie de s’éloigner d’une bonne ville. » Le sergent le conduit alors à un hôtel où il l’assure qu’il sera bien servi, chez le prévôt Hondré, chrétien comme eux. — À peine arrivé chez le prévôt, où il reçoit le meilleur accueil, Huon appelle le vieux Jérôme : « Sire Jérôme, lui dit-il, allez sans retard parcourir les rues de la ville et faites crier partout que les fous, les ménestrels et les ribauds oisifs peuvent s’en venir manger à mon hôtel ; ils y seront largement hébergés et sans payer leur écot. Vous irez aussi à la boucherie et ferez apporter ici toute la viande et tout le poisson frais ou salé que vous y trouverez. Vous paierez grandement et sans marchander. « Mais, seigneur, dit l’hôte, j’ai des vivres en abondance et je vous ai offert tout ce que renferme mon hôtel. — Je ne veux rien vous coûter, répond Huon, car je ne manque point d’argent, et j’ai un précieux hanap qui fournirait du vin à tous ceux qui sont au monde. » En même temps il prend son cor d’ivoire et prie l’hôte de le lui garder jusqu’à ce qu’il en ait besoin. Grande folie ! un moment viendra où Huon la rachèterait volontiers au prix de la cité de Laon. P. 117-121.

Cependant, le vieux Jérôme, qui savait très bien parler sarrasin, est monté à cheval et a fait crier par les rues l’invitation de Huon, à la grande joie de tous les ribauds. Ils accourent, au nombre de plus de quatre cents, s’asseoir à la table de Huon, qui les sert et leur verse en abondance le vin qui coule sans cesse de son hanap. — Mais Jérôme a fait au marché de telles provisions que le sénéchal du duc n’y trouve plus rien à acheter pour le souper de son maître. « Qui diable a ainsi vidé le marché ? s’écrie-t-il. —