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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

reil, dit le tailleur. Je voulais dire une casaque de paysan, que nous appelons un loup. – Cher maître, dit Ulespiègle, je ne le savais pas. Si j’avais connu votre intention, j’aurais mieux aimé faire la casaque que le loup. » Le tailleur se contenta de cette explication ; aussi bien le mal était fait. Au bout de quatre jours, le tailleur se trouva fatigué le soir. Il serait volontiers allé dormir, mais il se dit qu’il était trop de bonne heure pour envoyer coucher son garçon. Il y avait là un habit auquel il ne restait plus qu’à attacher les manches. Il les jeta à Ulespiègle et lui dit : « Tiens, jette-moi les manches à cet habit. » Puis il alla se mettre au lit. Ulespiègle dit oui, et le maître alla se coucher. Alors Ulespiègle suspendit l’habit au porte-manteau, et alluma deux chandelles, une de chaque côté de l’habit. Il prit une manche et la jeta contre l’habit, sur un des côtés ; puis il passa de l’autre côté et en fit autant avec l’autre manche. Quand les deux chandelles furent brûlées, il en alluma deux autres, et il continua à jeter les manches contre l’habit pendant toute la nuit, jusqu’au matin. Le maître se leva et vint dans l’atelier. Ulespiègle continuait à jeter les manches sans se retourner. Le maître s’était arrêté pour regarder cela, et dit : « Quelle diable de jonglerie fais-tu maintenant ? – Je ne trouve pas cela une jonglerie, répondit Ulespiègle ; j’ai passé la nuit entière à jeter ces maudites manches contre cet habit, et elles ne veulent pas tenir. Vous auriez bien mieux fait de m’envoyer dormir, que de me dire de jeter ces manches. Vous