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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

des pelisses en peau de loup. Ulespiègle répondit qu’oui, et qu’il était très connu en Saxe pour cela. Le fourreur lui dit : « Mon cher garçon, tu m’arrives bien à propos. Viens, nous nous entendrons bien pour les gages. » Ulespiègle lui dit : « Oui, maître, vous m’avez l’air d’un honnête homme ; vous verrez vous-même quand ma besogne sera faite. Mais je ne travaille pas avec les autres garçons ; je veux être seul, afin de pouvoir faire mon ouvrage à ma volonté et sans être gêné. » En conséquence, le maître lui donna une petite chambre, et lui mit entre les mains plusieurs peaux de loup qui étaient préparées pour faire des pelisses, et lui donna la mesure de chaque pelisse, grande ou petite. Alors Ulespiègle commença à étendre ses peaux et à les tailler, et fit de toutes des loups, qu’il remplit de foin, et auxquels il fit des jambes avec des baguettes, comme s’ils étaient en vie. Quand il eut ainsi gâté toutes les peaux et fait les loups, il alla dire au fourreur : « Maître, les loups sont faits ; y a-t-il autre chose à faire ? – Oui, mon fils, dit le fourreur ; maintenant couds-en ce que tu pourras. » En disant cela, il entra dans la chambre et vit les loups par terre, grands et petits, et dit : « Qu’est-ce que cela ? Que le diable t’emporte ! Quel tort tu m’as fait ! Je vais te faire arrêter et punir ! – Maître, dit Ulespiègle, est-ce ainsi que vous me payez et que vous me remerciez ? J’ai fait cela d’après vos propres paroles. Vous m’avez bien dit de faire des loups ; si vous m’aviez dit de faire des pelisses, je l’aurais fait. Si j’avais su