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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

et retarder par un loup. Que, quant à lui, s’il était seul dans les champs, et qu’il vînt deux loups l’assaillir, il les battrait et les chasserait, et n’en aurait pas peur ; tandis qu’eux, qui étaient trois, s’étaient laissés effrayer par un loup. Durant toute la soirée, l’aubergiste ne cessa de se moquer ainsi de ces pauvres marchands, jusqu’à ce qu’ils allèrent se coucher. Ulespiègle était là qui entendait les railleries. On les mit à coucher dans la même chambre qu’Ulespiègle. Quand ils furent au lit, les marchands se demandaient entre eux ce qu’ils pourraient bien faire pour se venger de l’aubergiste et lui clore la bouche, car sans cela cette histoire ne finirait pas tant que l’un d’eux viendrait à cette auberge. « Chers amis, leur dit Ulespiègle, je vois bien que l’aubergiste est un fanfaron. Voulez-vous m’écouter ? Je vous vengerai de telle sorte que jamais plus il ne vous parlera du loup. » Cela plut aux marchands, qui lui promirent de le défrayer et de lui donner de l’argent par dessus le marché. Il leur dit alors de continuer leur voyage et de revenir dans cette auberge lors de leur retour, qu’il y serait aussi, et qu’il les vengerait. Cela se fit ainsi. Les marchands se préparèrent à partir, et payèrent leur dépense ainsi que celle d’Ulespiègle ; ils quittèrent l’auberge, et l’hôte leur cria d’un ton railleur : « Messieurs les marchands, prenez garde que quelque loup ne vous assaille dans la prairie ! — Monsieur l’hôte, répondirent les marchands, merci de l’avis ; si les loups nous mangent, nous ne reviendrons pas ; si c’est vous qu’ils mangent, nous ne