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Préface.

Cele l’entent, tous li sans li fremi ;
Pensive fu, li cuers amorti[1].

Mais il serait aussi superflu que fastidieux de pousser plus loin ces rapprochements. J’ai assez montré comment en usaient les éditeurs italiens de nos anciens poëmes à l’égard des textes qu’ils avaient sous les yeux. J’ai assez mis en évidence le double but qu’ils se proposaient en les altérant. J’ai assez fait voir et expliqué la barbarie de leur langage.

Cette barbarie, notons-le bien, n’est pas toujours et partout la même. Elle varie d’abord de poëme à poëme ; elle varie ensuite, à ne considérer qu’un texte, de tirade à tirade, de vers à vers ; et pourquoi dans les deux cas ? Dans le premier, cela tient au degré d’ignorance des jongleurs italiens ; dans le second, au degré de difficulté que leur offraient les diverses parties d’un même poëme.

Plus on est ignorant, plus on suppose que les autres le sont, et plus on est enclin à traduire, à commenter, à gloser. Médiocre inconvénient, quand les textes sont respectés ; mais ici traduction, commentaire ou glose se produisaient non à côté du texte, mais à ses dépens, et le transformaient pour l’expliquer. En second lieu, un même texte n’est pas partout aussi difficile à entendre, ne foisonne pas également en idiotismes. C’est donc naturellement sur les points les plus obscurs que se portera l’effort du commentateur. De là les différences que je viens de signaler, et qu’il m’importait de faire remarquer.

  1. Ms fr., 12,548, fol. 4 r°, col. 2.