Page:Anonyme - Macaire, chanson de geste.djvu/185

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Sommaire.

dement que leurs écus volent en éclats ; mais leurs hauberts résistent et les protègent. Les deux chevaux plient et fléchissent du genou ; les deux lances tombent à terre en tronçons.

Le combat recommence à l’épée. Varocher en frappe le premier. Il ne peut entamer le heaume d’Ogier, que Dieu protége ; mais il lui tranche le devant de son haubert. « Sainte Marie ! dit Ogier, quel fil a cette épée ! Il ne m’aimait guère celui qui en fit don. » À son tour, le Danois atteint Varocher sur la tête d’un coup si terrible qu’il le fait plier en avant sur l’arçon de sa selle. « Sainte Marie, refuge des pécheurs, s’écrie Varocher, défendez-moi contre la mort ! — Me reconnais-tu ? dit Ogier. Allons, rends-toi sans plus tarder ! — Vaines paroles ! répond Varocher ; je ne suis pas encore à ta discrétion. » Et tous deux reprennent la lutte avec une nouvelle ardeur. Bientôt leurs armures sont en pièces, hormis les heaumes. Ogier admire la vaillance de son adversaire : « Sire chevalier, lui dit-il, comment vous nomme-t-on à la cour de l’empereur que vous servez ? — J’ai nom Varocher. Il y a peu de temps que je suis chevalier ; je n’étais d’abord qu’un vilain vivant dans les bois. Mais l’empereur, en reconnaissance d’un service que je lui ai rendu, m’a conféré la chevalerie. Si le roi Charlemagne savait certain secret que je ne puis révéler, loin de t’envoyer ici pour me combattre et pour me tuer, il me prendrait en amitié, il me chérirait. — Noble chevalier, dit le Danois, s’il vous plaisait de me confier ce secret, peut-être pourrions-nous, vous et moi, mettre fin à ce combat et nous accorder tous deux sans coup férir ?